Rembobine, avance, vidéo séance: cinquante ans de feed-back
En 1972, Jean-Pierre Boyer, récemment diplômé en histoire de l’art et travaillant au Musée d’art contemporain de Montréal (MAC), rencontre un jeune artiste du nom de Gilles Chartier, qui lui montre une série de photographies absolument incroyables. Ces photos résultent d’une expérimentation que fait Chartier en pointant une caméra vidéo vers son propre moniteur. Dans leur géométrie organique, ces nouvelles images sont étranges tout en étant étrangement familières.
Boyer est fasciné. Cette rencontre allait initier un intérêt chez lui pour l’art vidéo, et l’amener à organiser une séance d’animation (1972) et une conférence, « L’image électronique » (1974), au MAC. Par la même occasion, Boyer entre en contact avec Steina et Woody Vasulka, qui, à leur tour, entament une collaboration avec James Crutchfield, un physicien développant ses théories sur le chaos en s’inspirant du travail émergent du milieu de la vidéo expérimentale. À l’époque, le feed-back vidéo influence simultanément l’art et la science.
Cet essai traite de l’expérimentation technologique analogue en art vidéo au sein même de la collection Vidéographe et par-delà celle-ci. Comment les artistes appliquent-iels des stratégies d’innovation, de reconfiguration, et de mauvaise utilisation intentionnelle, et ce afin d’expérimenter les possibilités des technologies vidéo? Quelles sont les répercussions de telles approches, et comment pouvons-nous interpréter le sens qui s’en dégage? Comment les artistes travaillant la vidéo aujourd’hui diffèrent-iels, dans leurs intentions et techniques, des artistes d’il y a une cinquantaine d’années?
Réaction, diffusion: l’étrange boucle du feed-back
Le feed-back optique1 – pointer une caméra vidéo vers son propre moniteur afin de générer un cycle de feed-back de formes complexes en temps réel – est la forme la plus fondamentale2 d’art vidéo. Pour Gilles Chartier, il s’agissait d’une révélation. Jules Arbec décrit ainsi leur première rencontre:
En compagnie de quelques amis, Chartier travaillait, un jour, au tournage d'un magnétoscope lorsqu'il braqua fortuitement la caméra sur le moniteur pour en capter les faisceaux lumineux qu'il enregistre sur bande magnéto d'une part, tout en les renvoyant simultanément à l'écran, duquel l'œil de la caméra se regardait lui-même par l'intermédiaire de l'écran. Cet incident banal aurait pu passer inaperçu aux yeux de la plupart, mais Chartier y vit un phénomène qui constituait déjà un éventail de possibilités qu'il mit à profit.3
La « découverte »4 de Chartier illustre certaines caractéristiques importantes que l'on retrouve dans d'autres formes d'expérimentation vidéo. Tout d’abord, il fait preuve d'une curiosité créative à l'égard du potentiel de cette nouvelle technologie vidéo. Ensuite, bien que cette découverte soit un accident, il en saisit le potentiel. Enfin, ses expérimentations prennent la forme d’une mauvaise utilisation délibérée – un véritable taboutechnologique, parce qu’on y déploie des méthodes de travail qui vont au-delà de celles utilisées de manière conventionnelle en télévision ou en vidéo – une pratique considérée comme potentiellement dommageable pour le matériel.
Les images que réalise Chartier sont à la fois captivantes et déroutantes, en constante évolution et éphémères. Arbec tenta de décrire les formes de feed-back résultant de ces expérimentations :
Elles naissent, grandissent puis éclatent, pour se recentraliser dans un cycle indéfini de variations, au rythme d'une musique très scandée. […] Mais les tentatives de Chartier nous font participer plus activement à la libération de la forme puisque nous assistons à sa genèse et à son élaboration dans un temps et un espace indéfinis.6
Si les expérimentations de Chartier semblent constituer les premières traces de cette pratique fascinante à Montréal, elle ne tarde pas à séduire d'autres artistes, comme Boyer ou encore Charles Binamé. L'œuvre Reaction 26 (1971) de ce dernier – un montage impressionnant d'expérimentations de feed-back optique, ponctué de musique – est le premier enregistrement de feed-back dans la collection Vidéographe. Diverses formes y sont évoquées : des bandes zébrées en expansion, des spirales en rotation, d’étranges nuages. Elles évoluent en temps réel, passant de l'ordre au chaos, à la fois indisciplinées et harmonieuses. Faisant tout simplement usage de la caméra et de la télévision, puis en travaillant avec la luminosité, le contraste, la rotation et le zoom, des artistes comme Binamé et Chartier ont pu rendre de phénomènes extrêmement complexes visibles – par exemple, les motifs de diffusion des réactions, la morphogenèse et la complexité émergente. C’est dans le but d’analyser des systèmes non-linéaires et de développer des théories du chaos que ces mêmes phénomènes sont explorés en 1984 par le physicien James Crutchfield. Ce dernier sera lui aussi appelé à retourner sa caméra vers l’écran afin de générer d'étranges boucles, superposant une musique psychédélique aux images captées par ses enregistrements.7
Corps sensibles et pratiques performatives
En 1972, le feed-back vidéo revêt une fonction symbolique au sein d’un travail narratif dans le film de Micheline « Mousse » Guernon intitulé Libidante, dans lequel des amant.e.s qui sont physiquement séparé.e.s se retrouvent ensemble grâce à leur désir. L’utilisation du feed-back dans cette oeuvre cinématographique se manifeste tout d’abord par l’apparition d’échos visuels de La création d’Adam (1508–12) de Michel Ange, au plafond de la chapelle Sixtine à Rome, et de La naissance de Vénus (1484–86) de Botticelli. Plus tard, les corps nus des personnages seul.e.s se superposent dans l’image, générant de nouveaux des motifs de feed-back. Ici, l’effet est une représentation de l’énergie sexuelle et de l’érotisme, un force générative entre des corps sensibles et par-delà ceux-ci, qui agit comme connexion entre les amant.e.s à travers le temps et l’espace.
Le feed-back peut être lui-même considéré comme un corps sensible. C’est ce à quoi fait allusion l’artiste vidéo Carol Goss, qui décrit avoir eu « la sensation d'interagir avec une force vivante, qui était mon égale »8 lorsqu’elle travaillait au Experimental Television Center de Binhamton, dans l'État de New York, en 1974-75. Son film Rings/Lovers (1975) est un exemple précurseur du feed-back de couleurs, créé en faisant usage d’une caméra à tube de capture et du Dave Jones Colorizer.9 Alors qu’un anneau circulaire est formé par des éléments tournants, doucement manipulés par l’artiste, le film explore avec soin le jeu de tension du feed-back – l’atteinte d’une balance parfaite. Goss y réfléchit dans son essai Evolution is Relentless: Analog is but a Dream (2004):
Le mouvement résultait du jeu entre l’artiste et la boucle de feed-back, faisant de ce cycle quelque chose de vivant. Le processus de création de l’image analogique reposait davantage sur l’intuition artistique que sur une technique rationnelle.10
Les artistes d’aujourd’hui font également usage de leur intuition esthétique dans leur relation encorporée (embodied) avec la vidéo. C’est le cas de Sonya Stefan, artiste vivant à Montréal et travaillant avec la danse et l’art numérique – sa pratique inclut notamment le travail du glitch analogue sur VHS et en vidéo 16 mm, l’utilisation de systèmes de feed-back vidéo, ainsi que la vidéo danse. Dans son travail, le feed-back prend forme en contexte performatif, ainsi qu’en collaboration avec des musicien.ne.s. Il est donc plutôt éphémère, bien que son compte Instagram (@morfeolastrega) soit une archive fantastique de ses expérimentations, présentant de courts extraits de documentation. Selon l’artiste, le feed-back vidéo et la danse sont analogues de multiples manières: ils existent dans le moment présent, sont façonnés par l’espace, et requièrent une sensibilité, une réponse. Stefan considère le feed-back comme une entité ayant sa propre agentivité, avec laquelle elle travaille et à laquelle elle répond. Elle décrit ainsi sa première rencontre avec le feed-back vidéo:
Je n’ai pu qu’y ressentir une énergie. Une énergie qui n’était pas contrôlée, qui avait son propre corps, sa propre sensibilité. Voilà donc les deux liens [avec la danse] pour moi : être dans le moment présent, et ne pas contrôler quelque chose, mais plutôt simplement être avec quelque chose… Je dis que c'est incontrôlé, mais ce n'est pas incontrôlé. Il s'agit en fait de comprendre des informations par l'intermédiaire d'un corps sensible et de réagir à ces informations par l'intermédiaire d'un corps sensible.11
Ce qui permet à Stefan d’accepter et de travailler (avec) la nature incontrôlable du feed-back en performance, c’est selon moi son expérience en tant que danseuse travaillant l’improvisation chorégraphique. En effet, le feed-back et elle sont tous les deux des « corps » sensibles, qui réagissent l’un à l’autre dans le moment présent.
Coordonner le cerveau à l’oeil à la main: vidéo-cortex et vidéo-synthèse
Retour à Montréal en juin 1974, et à un autre groupe d'artistes souhaitant explorer la correspondance sensible entre le corps et le signal vidéo. Jean-Pierre Boyer, Gilles Chartier, David Rahn, entre autres, ont invité des participant.e.s à Vidéographe pour ce qu’ils appellent une séance de télévision expérimentale12. Pendant deux jours, ils mènent des expérimentations de « biofeedback » – induisant des états de transe, ils tentent d'utiliser les signaux électriques du cerveau pour générer et contrôler le signal vidéo, voir même s’harmoniser avec lui. Ces expériences ont complètement reconfiguré la relation entre le public et l'image en mouvement; comme le remarque Eric Fillion, « chaque participant.e est appelé.e à être son propre matériel, à la fois performeur.euse et spectateur.ice »13. Cette pratique est visible dans une œuvre de Boyer, Vidéo-Cortex (1974), une vidéo représentant d’un côté l’image monochrome d’une personne participant au biofeedback, et de l’autre, les images qu’elle observe et altère.
Au début des années 1970, les artistes vidéo entretiennent un rapport très concret à la technologie, y mettant la main à la pâte. Notamment, des centres d’artistes autogérés du Canada et des États-Unis collectionnent et adaptent de nouveaux outils technologiques au fur et à mesure qu’ils apparaissent, allant même jusqu’à en inventer – l’« Éditomètre » développé chez Vidéographe en est un excellent exemple. Au-delà des besoins conventionnels de fonctionnalité et d'efficacité, se trouve aussi le désir de mettre à l'œuvre de nouvelles méthodes de création d'images. Les mixeurs vidéo, les colorisateurs et les synthétiseurs vidéo offrent aux artistes de nouvelles possibilités de manipulation tactile, en temps réel, de l'image électronique. À l’époque, Boyer invente même sa propre machine, le « Boyétizeur » – une sorte de télévision altérée capable de générer des images électroniques étranges et des oscillations géométriques à partir de signaux électroniques. Intéressé par la synthèse du son et de l'image, Boyer utilise son Boyétizeur pour transformer des enregistrements sonores afin de créer ses films Le chant magnétique (1973-74) et Phonoptic (1974).
Au même moment, le travail ludique de David Rahn explore les possibilités du traitement de l’image vidéo, particulièrement l’utilisation de la couleur. Notamment, pour Video Clouds (1974), Rahn manipule des images de phénomènes naturels, tels que des nuages et de l'eau, en utilisant la colorisation pour insuffler à l'écran des images tout à fait saturées. On peut y apercevoir sa manipulation des teintes, comment il navigue la limite des effets – on jurerait pouvoir sentir ses doigts sur le curseur. Rahn semble être à la recherche d’un point de basculement. Dans Fireworks (1976), il nous donne à voir sa version des dessins d’enfants au crayon de cire, alors que des motifs explosifs révèlent une panoplie de pastels multicolores. Cette palette de couleurs suggère l’intégration d’un feed-back de mixeur vidéo, ou bien le recours à une technique de re-colorisation répétitive de l’image. Comme dans les films de Boyer, ces œuvres sont une documentation de l’artiste explorant les possibilités d’une nouvelle technologie en temps réel, au-delà des modalités conventionnelles du cinéma ou de la télévision.
Rob Feulner et Charlotte Clermont sont deux bricoleur.euses dont le travail fait partie de la collection de Vidéographe. À l’instar de Boyer et de Rahn, tous.tes deux ont un intérêt particulier pour la technologie, ainsi qu’une manière de créer des images qui est à la fois joueuse et exploratoire. Leurs films sont souvent parsemés de couleurs et de glitchs, donnant à voir une synchronicité entre le son et l’image. Notamment, l'œuvre Cable Box (2020), de Feulner, se base sur l’idée d’une diffusion de radio pirate interrompue par le changement de poste compulsif de la personne qui écoute – l’artiste y utilise une panoplie d’outils de glitch pour rompre le cycle interminable de sitcoms, discours politiques, publicités, chaînes de nouvelles en continu. Le signal vidéo est tout d’abord interrompu par une patineuse fluorescente qui traverse une mer de feed-back créés en utilisant une chaîne de mixeurs vidéo14, laissant dans l’image une trace chromatique. Feulner emploie fréquemment un « dirty mixer » – un outil DIY de vidéo-glitch15 – pour brouiller l’image diffusée. Il utilise également un Rutt/Etra Scan Processor (trouvé à Signal Culture, à Owego, dans l’État de New York) afin de restituer des images trouvées sur un écran d’oscilloscope, ce qui confère une esthétique militaire aux images. L’artiste est extrêmement conscient de la manière dont les textures des images – et les technologies qui y sont associées – peuvent être interprétées, et aux contextes qu’elles infèrent par la même occasion. Cette référentialité rappelle ce qu’avance Paul Carpin dans le documentaire Processing the Signal (1989):
La technologie est toujours mal utilisée, voyez-vous. Tout ce qui est possible de faire en vidéo nous vient de comment nous apprenons à détruire. Toutes les technologies numériques d'ADO, de Mirage, et les autres – elles n'ont pas été développées pour la télévision, mais pour les systèmes de défense. Ces technologies sont des sortes de sous-produits de la recherche militaire.16
Finalement, Feulner incorpore des inserts textuels cryptiques et glitchy, encodés sur un générateur de titres modifié par circuit bending – son auteur absent nous donnant des indices afin de résoudre son énigme. Si seulement nous pouvions décoder les fréquences du décodeur TV. Feulner n’hésite pas lui non plus à mettre les mains à la pâte – la patineuse que l’on retrouve dans Cable Box apparaît également dans son court vidéo Pivot Forward Collapse (2020), dans lequel l’illusion du fait de patiner à travers du noise vidéo est réalisée par la manipulation manuelle de la bande d’un magnétoscope. Les interventions de Feulner reflètent le désir grandissant, chez les artistes de l’ère numérique, d’une relation plus tactile avec le processus de création d’images:
Les outils numériques sont pré-programmés. À moins d’y plonger réellement et de trouver le code GitHub et tout le reste, on ne peut pas les changer, on ne peut pas les manipuler, on ne peut pas en faire un usage détourné. Et je crois que c’est ce que j’aime des outils analogiques, c’est qu’on peut les utiliser de la mauvaise manière. Je peux travailler dans le sens contraire de sa fonction initiale, bouleverser autre chose.17
Charlotte Clermont est une autre artiste qui combine plusieurs médiums numériques et les poussent jusqu’à un point de rupture, tout en les ancrant dans des trames sonores de musique noise crépitante. Ses films rassemblent des séquences monochromes de vidéosurveillance ou de 16 mm, des images sur-saturées issues de VHS, ainsi que du titrage analogique. Dans How Flowers Never Became a Food Group (2017), Clermont prend comme point de départ une captation MiniDV de fleurs, qu’elle projette puis re-capte à l’aide d’une caméra vidéo pour enfant.
La caméra avait un récepteur, avec une antenne. Ma montre interférait avec le signal… alors j’ai commencé à bouger autour, et des fois j’étais chanceuse. La manipulation de couleurs a elle aussi été réalisée en altérant le signal.18
Certains moments sont captés en film 16 mm – des plans dans lesquels la caméra examine des objets non-identifiables, puis passe à du bruit de VHS, et des erreurs de cassette. Le fameux écran bleu y joue un rôle central, en marquant les actions du stop et du play. Ces moments entre l'œuvre sont en fait l'œuvre elle-même. Comme chez Feulner, cela crée l’impression d’un message tentant de frayer son chemin à travers le médium. Clermont place ici la personne qui regarde dans une posture d'interprétation, nous invitant à analyser, à la fois scientifiquement et poétiquement, les indices qu’elle nous laisse à travers les images et le texte – par exemple, avec la question BUT HOW DO YOU FIGURE OUT A FLOWER? (Pouvant être traduit par mais comment est-ce qu’on peut comprendre une fleur?). Peut-être le langage visuel et technologique que Clermont tente d’explorer nous est-il trop étranger. Ses films incluent souvent des obstacles à la communication et à l'interprétation. Son oeuvre Plant Dreaming Deep (2017), par exemple, contient une série de titrage apparaissant avec de multiples caractères manquants – T_at we ca_ see_ t_ b_e rea_able t_ eac_ _t_er _a s_c_ a s_ubtle ___a_ level, peut-on voir à l’écran. Elle déploie également des glitchs extrêmes – des arc-en-ciels de bruit analogue –, développés entre autres à Signal Culture, grâce à un synthétiseur vidéo. Ce film est à la fois une documentation de l’exploration de ces technologies, et une observation profonde de son effet sur l’image.
L’image est chargée de l’intensité des moments que j’ai vécus, personnellement. Mon expérience, puis l’expérience de regarder ces images ensuite, après coup, dans un autre espace temps – c’est cette distance qui est créée.19
Plus particulièrement, Feulner et Clermont sont intéressé.e.s par le noise et le glitch, rappelant le Glitch Studies Manifesto de Rosa Menkman. Dans son ouvrage The Glitch Moment/um (2011), elle propose que « les artistes du noise doivent exploiter les artéfacts du noise afin d’explorer les nouvelles possibilités qu’ils offrent. »20 Cependant, cette suggestion est suivie d’une mise en garde:
5. Réalisez que le gospel du glitch art nous apprend également ces nouveaux standards pouvant être mis en place par la corruption.
Toute pratique du glitch art n’est pas progressiste ou nouvelle. La popularisation et la cultivation d’une avant-garde de pratiques accidentelles est prévisible et inévitable. Soyez conscient.e.s des glitchs facilement reproductibles, automatisés par des logiciels et des plug-ins. Ce qui est aujourd’hui un glitch deviendra bientôt une mode.21
Clermont et Feulner sont trop, beaucoup trop impliqués tactilement dans leurs manipulations technologiques pour les plug-ins. Leur curiosité et leur engagement auprès des technologies analogues est profond; trop grande est leur fascination pour les processus de création d’images en temps réel. Tout comme Boyer et Rahn, tous.tes deux démontrent des stratégies d’invention et de transduction, opérant des liens entre diverses technologies et traduisant des informations d’un médium à l’autre.
Nous avons de si belles choses à vous montrer! Hellraisers hybrides
Qu’y a-t-il au-delà du Panasonic WJ-AVE5? Considérant la nature intrinsèquement transgressive de l’art vidéo, le médium ne devrait pas être confiné au bien-aimé mixeur vidéo ou à l’humble cable composite. L’indomptable signal vidéo peut être intégré (voire infiltré) dans d'autres médiums plus traditionnels et fixes, tout comme au sein de technologies numériques plus récentes.
Le cinéaste expérimental, artiste vidéo et commissaire Guillaume Vallée applique une méthodologie intermédiatique récursive de manière à créer un feed-back hybride aux textures chaotiques remarquables. Inspiré en partie par les sensations qu’il a vécu à l’âge de douze ans en regarder le Hellraiser (1987) de Clive Barker sur VHS, son but est de créer une expérience viscérale pour le public:
C’était ma rencontre avec une autre dimension. Avec le cinéma. C’est grâce à ça que je fais aujourd’hui des films. C’est grâce à ça et Un Chien Andalou, que j’ai vu quelques années plus tard… Je voulais faire du cinéma qui était très intense et psychédélique – ça rendait les gens malades, voir ce genre de choses.22
Pour son film What Is Beyond the Hellraiser? (2017), Vallée réutilise une boucle de deux secondes – créée sans caméra, avec de la peinture sur film –, qui est ensuite transférée en format DVD et projetée digitalement sur un écran de rétroprojecteur. Un deuxième projecteur et une caméra vidéo VHS sont mis à l’usage pour créer une boucle de feed-back optique par-dessus la première image. Ainsi, le matériel source est mobilisé à la fois comme point d’ancrage et lieu de détournement des formes de feed-back. Finalement, Vallée recapture cette image composite de l’autre côté de l’écran à l’aide d’une caméra Super 8 et d’un film Kodak Ektachrome. Le film résultant est un deux minutes trente huit secondes d’oscillation sonore et chromatique intense. Une trame sonore électronique l’accompagne sans répit, nous accrochant aux mouvements d’inhalation et d’expiration d’une fumée colorée – une respiration manipulée avec justesse par le zoom de la caméra vidéo au sein du système de feed-back – alors que le motif de réaction-diffusion se pointe momentanément à travers le brouillard.
Une telle recapture de feed-back vidéo sur film rappelle les exemples précurseurs de cette technique, telle la séquence titre de Doctor Who, ou bien le travail de Lutz Becker (notamment son œuvre Horizon, datant de 1967). Cette transduction rend le médium difficile à déchiffrer; nous pouvons déduire, en voyant les marques et les émulsions, qu’il existe matériellement en tant que bande de film, mais le mouvement est si changeant et complexe qu’il nous renvoie au feed-back vidéo. Des procédés chimiques et physiques sont ici en jeu. Nous ne regardons pas un film, mais le déploiement d’une force. En passant d’un médium à l’autre, Vallée agit à la fois comme guide spirituel et chasseur de fantômes. Si le feed-back vidéo est le fantôme, alors la bande est le piège qui contient l’esprit malveillant. Vallée a peut-être ouvert la boîte de casse-tête de Hellraiser, mais, remarquablement (et c’est tant mieux), il sait aussi comment la refermer.
Mon propre intérêt pour le feed-back naît de mon amour de ce qui fait des boucles, et de la rencontre entre les technologies. En tant qu’artiste numérique, j’en suis venu à considérer le feed-back vidéo comme un engin puissant et imprévisible pouvant être incorporé dans des installations vidéo. J’ai créé des installations de poésie (Generative Fiction, 2020) en faisant usage de titrage vidéo analogues afin de générer du texte défilant à travers une mer de feed-back vidéo, le combinant à une trame sonore réagissant aux fluctuations de couleurs. J’ai produit des installations de mapping projeté (PORTAL and Chroma Culture, 2019) qui combinent le duo classique caméra/projecteur avec du traitement vidéo numérique dans Isadora, et ce afin de créer des interfaces engageantes et interactives. J’ai même créé ce qui est peut-être le plus gros feed-back vidéo optique jamais réalisé, une installation grand format (Écran de Veille / Screen Savour, 2022) projetée sur un gratte-ciel dans le centre-ville de Montréal. Exposée aux éléments et à la lumière ambiante, cette œuvre est facilement affectée par son environnement et son public (y compris les pigeons). Il n’est peut-être pas aussi fiable que des œuvres purement numériques, mais le feed-back vidéo a certainement encore le pouvoir d’ensorceler, à la fois dans sa simplicité et dans sa capacité à générer des complexités.
Rembobiner, ré-enregistrer: transfiguration et dégradation par la récursivité
S’inspirant de l’oeuvre sonore I Am Sitting in a Room (1969) d’Alvin Lucier23, les artistes travaillant la vidéo peuvent faire usage de stratégies récursives d’enregistrement et de ré-enregistrement afin d’explorer de nouveaux langages visuels qui révèlent l’empreinte de la technologie. Bien que cette approche comprend l’enregistrement et la lecture en temps réel, elle diffère du feed-back vidéo conventionnel comme le signal n’est pas en boucle directe avec le moniteur. L’artiste introduit plutôt une étape discrète dans ce processus – celle d’enregistrer sur bande. Le film en résultant devient ainsi le matériel sur lequel ce procédé est appliqué encore, et encore. Cette cyclicité en plusieurs phases permet de s’attarder plus longuement à des images figuratives, d’analyser ses dégradations, et d’identifier les caractéristiques distinctes des environnements et technologies qui laissent leur marque sur l'œuvre, d’étape en étape.
Dans Métamorphoses (1972), Richard Martin applique cette technique vidéo en utilisant comme fondation figurative une captation d’une danseuse descendant des escaliers, alors qu’une trame sonore décrit l'œuvre originale de Lucier. Cette séquence rappelle le Nu descendant un escalier no.2 (1912) de Duchamp, œuvre qui analysait justement le mouvement à travers le temps et l’espace par une stratégie de superposition. Celle de Martin, ceci étant dit, crée une distorsion graduelle de la séquence – en la re-filmant, à travers l’écran télévisé, encore et encore. Chaque répétition du processus accentue le contraste de l’image, sa luminosité et ses ombres, tout en effaçant les textures plus subtiles, comme celle des briques et des traits du visage. Il n’en reste que les mouvements vagues de la personne qui danse, dont les formes deviennent de plus en plus floues jusqu’au point d’abstraction. À travers neuf itérations, le rythme de la chorégraphie sous-jacente est maintenu; cela dit, son expressivité est complètement transformée. Les formes évoluent, devenant quelque chose d’entièrement différent – quelque chose d’organique, mais d’étranger. Ce processus est reflété par la trame sonore, qui passe de mots distinguables aux longs sifflements du feed-back audio.
Quarante-quatre ans plus tard, il semblerait que nous soyons toujours pris dans la boucle; cependant, la pratique a évolué, et de jeunes artistes y contribuent maintenant de nouvelles perspectives. Puerto Rico Tautology (14 Dubs High) (2016), de l’artiste Rob Feulner, emploie une approche similaire à celle de Martin, poussant cela dit l'exploration par-delà la recherche formelle ou esthétique en l'ancrant dans le contexte social. L’artiste, de descendance portoricaine, s’intéresse à l’exode de masse des portoricains vers Orlando, en Floride. Il travaille donc à partir d’une séquence de trente secondes issue d’un VHS trouvé, dans laquelle on peut apercevoir des familles célébrant dans la rue, alors que Fania All-Stars, un groupe de musique salsa, donne un spectacle en arrière-plan. Dans ce cas-ci, Feulner travaille sans caméra, en copiant tout simplement la cassette sur une seconde, la deuxième sur une troisième, et ainsi de suite, poussant l’image non seulement vers l’abstraction, mais également le signal lui-même vers la dégradation et la perte. Par dessus ce son de plus en plus déformé, Feulner ajoute des enregistrements d’un membre de la Chambre des représentants des États-Unis plaidant pour que le Congrès permette à Puerto Rico de déclarer faillite.
Alors que le minutage de la bande est perdu et que le tout dégénère, nous faisons face à de plus en plus d'écrans bleus, qui indiquent l'absence non seulement d'images, mais aussi d'infrastructures d'information. Ce qui nous est suggéré semble être l'effondrement d'une société. L'effacement des communautés dépeintes dans le film représente précisément cela: l'effondrement progressif de la politique et de l'autonomie économique à Porto Rico. Il s'agit d'une dégradation structurelle et d'une perte générationnelle dans un sens très réel. Feulner, qui distribue ses films sur cassette VHS, exploite les limites de la technologie vidéo analogique en tant que format voué à la perte, tout en soulignant la fragilité du patrimoine médiatique en général, en particulier celui qui repose sur des supports physiques. Cette fragilité est placée dans le contexte du numérique, avec sa capacité infinie (ou ses promesses) de reproduction, de partage et de recherche. C’est ainsi que le travail d'artistes tels que Feulner, Clermont, Vallée, et d'autres – et donc, par extension, de Vidéographe – est à la fois une expression des formes de la production vidéo expérimentale et une forme d'archéologie des médias.
Bien que les intentions — et les œuvres résultantes — de Martin et de Feulner soient très différentes, les pratiques récursives décrites ci-dessus permettent aux deux artistes de transgresser des procédés de travail conventionnels grâce à la répétition. L'utilisation soi-disant correcte de la technologie est transformée pour devenir un détournement absurde aboutissant à des résultats surprenants. La fidélité à l’image source est rejetée au profit de l'abstraction et des possibilités extrêmes des fonctions technologiques qui y sont explorées. Métamorphoses et Puerto Rico Tautology s'opposent toutes deux à l'idée d'une « copie maîtresse ». La copie maîtresse devient ici l’ensemble de l'œuvre, la superposition des séquences — le processus lui-même. Une telle pratique, qui se détache du poids de la pérennité, entre en conflit avec la notion d'« originalité » sur le marché de l'art ainsi qu'avec la logique de la reproduction mécanique. Si la copie originale est modifiée à chaque fois qu'elle est copiée, alors elle n'est ni une copie ni l'original. À chaque itération, ces films évoluent pour créer de nouvelles formes et de nouvelles significations. Ils provoquent et renforcent délibérément les distorsions, jusqu'à ce que celles-ci fassent œuvre. Pour les artistes suffisamment curieux.euse de rejouer encore et encore les mêmes procédés, la récursivité s'avère être une méthodologie chaotique, mais fertile.
Nourrir l’avenir: un esprit de réinvention et de refus
L'augmentation de la puissance de calcul, les nouveaux développements des technologies numériques, les tendances artistiques – tous ces facteurs ont contribué au fait que depuis le milieu des années 1980, la synthèse vidéo analogique est considérée comme relativement peu pratique et démodée. Dans son essai Video Feedback – Lyricism in Patterns of Light (2010), l'artiste Barbara Doser affirme que « les possibilités actuelles du feed-back ne sont explorées que par un petit nombre d'artistes, de nos jours » ajoutant cependant que, malgré son apparente diminution, la pratique « continue d'exister et de fasciner en tant qu'événement visuel »24. Disposant maintenant d’une décennie de recul supplémentaire, je pense que nous pouvons aller plus loin, et affirmer plutôt que le feed-back, la synthèse vidéo et la vidéo analogique en général ont tous connu une énorme résurgence ces dernières années. Grâce à la loyauté des scènes DIY, à la baisse du coût de l'équipement d’origine, à la formation de communautés de hackers/bricoleur.euse.s et à l'essor des médias sociaux à partir de 2010, la pratique et la communauté qui l'entoure ont connu une croissance rapide.
Avec ses textures – ce bruit analogue qui lui est distinct –, son flux en temps réel et son ancrage dans des supports physiques, le signal vidéo continue d'inspirer les artistes, et ce même à l'ère numérique. Son potentiel est exploré dans les œuvres hybrides, le glitch art ainsi que la performance. Les jeunes artistes ont une relation différente avec la vidéo analogique, tout comme avec les premières photographies DV et argentiques. Pour cette nouvelle génération, la fascination se déploie à la lisière entre le familier et l’étranger, dans un intérêt pour son aspect fastidieux ou impratique et son caractère de nouveauté. Pourtant, cette technologie n'est ni nouvelle ni ancienne — elle est seulement différente. Mes ancien.ne.s étudiant.e.s du programme Intermedia de l'Université Concordia travaillent autant avec des caméras Sony 4K que des caméras de vidéosurveillance des années 1970. Il s'agit simplement d'un outil de plus, d'une relation différente à l'image en mouvement.
Il est à la fois irréel et encourageant de voir de jeunes artistes décider d’utiliser une caméra vidéo VHS seconde main pour filmer leurs ami.e.s qui ont un groupe de musique. De voir la prolifération croissante de bidouilleur.euse.s de circuits et d'ingénieur.e.s de synthétiseurs vidéo sur Instagram qui vendent du matériel piraté des années 1980, en développant même de toute pièce.
La communauté de l'art vidéo est en constante évolution. L'esprit de réinvention se perpétue à travers des espaces pour artistes bricoleur.euse.s comme Phase Space25, à New York (l’espace est aujourd'hui malheureusement fermé, mais il a été le repaire d’artistes vidéo prolifiques comme Andrei Jay et Paloma Kop); des plateformes en ligne telles que Scanlines.xyz et Video Circuits26. Au même moment, des événements tels que Téléprésence (organisé par Kop et Feulner) réunissent des artistes vidéo de Montréal et de New York, qui y présentent leurs installations techniques et des performances audiovisuelles. Le programme de résidence étatsunien Signal Culture, lui, permet à de nombreux jeunes artistes (dont Feulner, Clermont, Vallée et Kop) d'avoir accès à des synthétiseurs originaux et l'aide de spécialistes de ces technologies. Parallèlement, Vidéographe continue de soutenir et de diffuser des artistes vidéo à Montréal. En 2022, Feulner et moi avons organisé un atelier gratuit de glitch analogique à Vidéographe pour les artistes intéressé.e.s à explorer le signal vidéo. Nous avons passé trois jours d'été magnifiquement ensoleillés enfermés dans une pièce trop chaude avec dix participant.e.s super-enthousiastes, à créer des feed-backs en utilisant d’anciennes caméras et mixeurs vidéo ainsi que des synthétiseurs vidéo LZX actuels et des générateur de titres modifiés par circuit bending. Tous.tes sont rentré.e.s chez soi heureux.euse, avec une cassette. Cet été, dans le cadre de l’activité intitulée « Anciennes technologies, nouvelles pratiques »27, l'artiste Emily Sirota et moi-même avons présenté l’équipement archivé à Vidéographe aux artistes et technicien.ne.s intéressé.e.s. À travers la manipulation de caméras vidéo RCA et les discussions sur la rétro-ingénierie des anciennes caméras à tube de capture, nous avons ressenti le fort intérêt pour ce type de technologies à l’heure actuelle.
Tout cela peut sembler nostalgique, mais je crois qu’il s’agit plutôt là d’un rejet de l'idéologie du marché — celle voulant que la technologie la plus récente est la meilleure — et de la nécessité de mettre constamment à jour ses outils. Il est primordial que les artistes évitent l'Adobe-isation de la production artistique basée sur le cloud, et remettent en question le mythe selon lequel le soi-disant progrès technologique ne circule que dans une seule direction. Peut-être son mouvement est-il plutôt celui d’une spirale de rétroaction, éternellement régénérée, ou bien entrecroisée dans toutes les directions, comme un réseau souterrain de mycélium. Les jeunes artistes veulent peut-être aussi tout simplement lier des trucs qui ne devraient pas être liés. Peu importe – parce que si l'on se fie aux cinq dernières années, les cinquante prochaines pourraient être marquées par une hybridation étrange (mais positive) des pratiques analogiques et numériques.
L'innovation artistique technologique ne consiste pas à travailler dans le cadre des utilisations autorisées et des séquences de travail prévues, mais à élargir le potentiel de la technologie par une mauvaise utilisation intentionnelle des outils, et une (re)configuration de ceux-ci. Cela signifie qu'il faut regarder vers l’arrière autant que vers l’avant, et ce afin d’attraper les occasions d’expérimentation manquées à partir d'un nouveau cadre de référence. Comme l'affirme Carol Goss, « L’évolution est sans relâche… Du point de vue de l'artiste, cependant, la technologie devrait être additive, et non pas soustractive ou compétitive ».28
Je laisserai le mot de la fin à Boyer lui-même, puisqu'une grande partie de tout ceci semble être une conséquence – indirectement, du moins – de sa curiosité initiale pour ces étranges images en boucle. Voici un paragraphe de son essai « VIDEO : Zoom Out/Zoom In - LET IMAGES REMAIN IMAGES » :
La vidéo dépend trop souvent d'une conception cinématographique de la forme, de la linéarité et de la narration. La télévision a été décrite comme une radio avec des images ; c'est une attitude trop souvent répétée dans le travail avec la bande vidéo. La vidéo est avant tout un médium visuel. Il est donc important d'être conscient de la spécificité du support, en utilisant l'image elle-même pour exprimer et renforcer le contenu de l'information. Dans cette optique, il faut restaurer une approche expérimentale de la vidéo, en explorant sans relâche les potentiels insoupçonnées de l'image électronique.29
- Une explication plus complète des systèmes de feed-back – dans leur variation optique, interne, hybride – peut être trouvée dans Technès Encyclopedia of Film Techniques and Technologies: chapitre 5 “Ruins, Accident, Glitch” (Bolognesi, Pia, and Meech, Sam). Voir: https://encyclo-technes.org/en/parcours/experimental/ruins-accident-glitch/5
- Les origines de l’art vidéo sont sujettes à débat, cependant, il semblerait que les premiers exemples de feed-back (étant par la même occasion, selon moi, de l’art vidéo) sont trouvées dans la séquence d’ouverture de An Unearthly Child, le premier épuside de la série télévisée britannique Doctor Who, produite par Verity Lambert et diffusée le 23 novembre 1963. Cette séquence a été créée par le designer graphique Bernard Lodge, aux côtés de Norman Taylor et Ben Palmer, ainsi que le caméraman Hugh Sheppard. Elle prédate donc Sony Portapak (1965), oeuvre de Nam June Paik, mais pas sa première exposition télévisée, qui date plutôt de mai 1963. Ceci étant dit, comme le soulève Toby Hadoke, historien de l’émission Doctor Who, dans son balado Too Much Information 1.0 – The Pilot, des éléments de ce feed-back spécifique à l’émission britannique peuvent être repérés dans la séquence titre d’une production de la BBC intitulée Tobias and the Angel, diffuée le 19 mai 1960. Cette séquence a été créée par Ben Palmer, suivant des expérimentations de Norman Taylor. Écouter: Toby Hadoke, “Too Much Information – The Pilot: Show Notes,” Patreon, 2020. https://www.patreon.com/posts/too-much-pilot-44225441.
- Jules Arbec, “Graphisme lumineux,” Vie des Arts 18, no. 71 (summer 1973): 56. Available at: https://www.erudit.org/fr/revues/va/1973-v18-n71-va1192838/57825ac/.
- Les Vasulka évoquent leur première rencontre avec le phénomène dans une entrevue accordée en 1983 à Linda Furlong: « Notre découverte était une découverte parce que nous l'avons découverte. Nous ne savions pas que tous ces gens l'avaient découvert avant nous. C'était comme le feed-back : pointer la caméra sur la télévision, c’est une invention qui a été inventée à maintes reprises. Aussi tard qu’en 1972, des personnes croyaient encore inventer le feed-back, pensant qu'ils venaient de saisir le feu des dieux. » (Traduit de l’anglais). Linda Furlong, "Notes Towards History of Image-Processed Video : Steina and Woody Vasulka", AFTERIMAGE 11, no. 5 (décembre 1983) : 12-17. http://www.vasulka.org/Kitchen/essays_furlong/K_Furlong.html or http://vasulka.org/archive/4-30c/AfterImageDec83(5001).pdf.
- Douglas Hoftstadter, un chercheur américain en sciences cognitives, a fait usage d’expérimentations avec le feed-back pour développer certaines de ses théories sur la conscience. Dans son livre I Am a Strange Loop, il suggère que l’attirance pour cette forme spécifique de tabou technologique est enracinée dans quelque chose de bien plus profond : « Le feed-back – faire revenir un système en arrière ou le faire se retourner sur lui-même, donnant forme à une sorte de boucle mystiquement taboue – semble être dangereux, jouer avec le destin, peut-être même être intrinsèquement mauvais, quoi que cela puisse signifier. Ce sont des intuitions primales et irrationnelles, et qui sait d'où elles viennent ». (p. 41) Douglas Hofstadter, I Am a Strange Loop (New York : Basic Books, 2007).
- Arbec. (1973). “Graphisme lumineux”, 57.
- Dans un article scientifique datant de 1984, “Space-Time Dynamics in Video Feedback”, Crutchfield déclare que, “d’une manière très concrète, un système de feed-back vidéo et un simulateur d’espace-temps” (Traduit de l’anglais). James Crutchfield, “Space-Time Dynamics in Video Feedback,” Physica D: Nonlinear Phenomena 10, nos. 1–2 (1984): 229–45, https://archive.org/details/SpaceTimeDynamicsOfVideoFeedback.
- Goss, Carol – Issu d’un échange de courriel datant du 28 septembre 2022.
- Pour plus d’informations sur le David Jones Colorizer au Experimental Television Centre, voir: https://www.videohistoryproject.org/jones-colorizer-history-design
- Goss, Carol “Evolution Is Relentless: Analog Is but a Dream…”, The Squealor (Buffalo Media Resources), winter/spring 2004: 12–13, http://www.improvart.com/goss/evolution.html.
- Stefan, Sonya. – Issu d’une entrevue réalisée le 19 avril 2019.
- Ce n’était pas la première tentative de Boyer. Selon Éric Fillion, dès « octobre 1972, il fait un premier pas dans cette direction et organise une séance d’animation vidéo au Musée d’art contemporain ». Eric Fillion, « Du Feedback au Vidéo-Cortex: L’image électronique vue par Jean-Pierre Boyer » (Montreal: Hors champ, 2013), https://horschamp.qc.ca/article/du-feedback-au-vido-cortex.
- Ibid.
- Par exemple, le Panasonic WJ-MX12 et le Edirol V4.
- Les dirty mixer sont conçus et distribués par Gieskes.nl.
- Marcello Dantas, dir., Processing the Signal (documentary), 1989. Traduit de l’anglais.
- Feulner, Rob. – Tiré d’une entrevue réalisée le 17 avril 2019.
- Clermont, Charlotte. – Tiré d’un échange courriel datant du 29 septembre 2022.
- Clermont, Charlotte. – Tiré d’un échange de courriel datant du 29 septembre 2022.
- Rosa Menkman, The Glitch Moment/um (Amsterdam: Institute of Network Cultures, Amsterdam University of Applied Sciences, 2011, 11 https://beyondresolution.info/Glitch-Moment-um.
- Idem.
- Vallée, G. – Issu d’une entrevue réalisée le 11 avril 2019.
- Lucier enregistre le son de sa propre voix dans une pièce, puis refait jouer l’enregistrement dans cette même pièce en ré-enregistrant le son qui en résulte. À chaque itération, la réverbération dans l’espace se superpose de plus en plus à sa voix, effaçant ses mots tout en maintenant un semblant de structure.
- Barbara Doser, Video Feedback – Lyricism in Patterns of Light (Vienna: ST/A/R Printmedium, 2010),
- Phase Space propose des événements et des ateliers de manière régulière. Voir: https://phasespace.nyc/.
- Voir le groupe Facebook Video Circuits, créé par Chris King et Christopher Konopka en 2013: https://www.facebook.com/groups/VIDEOCIRCUITS/.
- Videograhe – Old Technologies New Practices workshop – 2023 - https://www.videographe.org/en/activity/old-technologies-new-practices/, https://www.sunpendulum.at/cooperation/doser/book/Video-Feedback-Lyricism-of-Light-Essay-Barbara-Doser.pdf
- Goss, “Evolution Is Relentless.”
- Jean-Pierre Boyer, “VIDEO: Zoom Out/Zoom In – LET IMAGES REMAIN IMAGES” (n.p., n.d. [1970s]), https://archive.org/details/vasulka10415.